Qu'est-ce que c'est?
L'anomalie de Peters est une malformation congénitale dans le développement embryonnaire du segment antérieur du globe oculaire. Les patients atteints naissent avec une opacité au centre de la cornée.
La cornée est située dans la partie la plus antérieure du globe oculaire. Normalement, la cornée est un tissu transparent, en raison de l'absence de vaisseaux sanguins et de la distribution des fibres qui la forment. Il se compose de 5 couches: l'épithélium, la membrane de Bowman, le stroma, la membrane de Descemet et l'endothélium.
L'anomalie de Peters est une pathologie rare qui touche environ 1 personne sur un million et qui est responsable de 40% des opacités cornéennes congénitales. Elle peut toucher un seul œil ou les deux, bien que dans 80% des cas elle soit bilatérale et asymétrique. Sa cause exacte est inconnue, bien que les gènes qui affectent le développement embryonnaire de l'œil soient impliqués parmi les facteurs étiopathogéniques.
Ces mutations génétiques peuvent se produire dans au moins 4 gènes : PAX6, PITX2, FOXC1 et CYP1B1. Le gène PAX6 est le gène qui régule le développement embryonnaire du globe oculaire et les mutations de ce gène peuvent provoquer d'autres pathologies telles que l'aniridie congénitale. La plupart des cas sont sporadiques, mais des modes de transmission autosomique récessive et dominante ont été décrits, dans lesquels plusieurs membres de la famille présentent la même altération.
Symptômes et signes cliniques
L'anomalie de Peters est généralement détectée par le pédiatre immédiatement après l'accouchement, car les nouveau-nés ont une tâche blanche au centre de la cornée. La membrane de Descemet tout comme le stroma postérieur et l'endothélium du centre de la cornée sont alors incapables de se développer, entraînant une opacité dans la partie centrale de la cornée (leucome, du grec leukos qui signifie blanc).
Généralement, la périphérie cornéenne n’est pas affectée et la présence d'adhérences (synéchies) entre la malformation cornéenne et l'iris est caractéristique. La perte de transparence de la partie centrale se traduit par une diminution de la vision, qui sera d'autant plus importante que la taille et la densité du leucome sont importantes.
Bien que l'opacité en soit le signe le plus caractéristique, l'anomalie de Peters est généralement associée à d'autres malformations oculaires tels que le glaucome (augmentation de la pression oculaire qui peut endommager le nerf optique et s’avère être la complication la plus grave de cette anomalie), le nystagmus (mouvement involontaire des yeux, en raison de l'absence de fixation dans la rétine centrale), la cataracte (perte de transparence du cristallin) ou le décollement de la rétine.
Dans les cas les plus graves, il n'y a pas de développement du globe oculaire, donnant lieu à un œil rudimentaire que nous appelons microphtalmie. Parfois, l'erreur génétique (mutation) peut être multiple et d'autres organes et systèmes sont affectés. Cette condition est appelée syndrome de Peters Plus et survient avec une maladie cardiaque, une surdité, une petite taille, un retard mental, une fente labio-palatine ou fissure palatine.
Traitement
Le traitement de ces patients nécessite une approche multidisciplinaire, s’appuyant sur un spécialiste de la cornée et un ophtalmologiste pédiatrique. Dans les cas où l’anomalie est bilatérale, un traitement chirurgical par kératoplastie pénétrante (greffe de cornée en pleine épaisseur) est indiqué. La chirurgie consiste à remplacer la cornée opaque par une cornée saine provenant d'un donneur.
Si le patient a également une cataracte, son ablation peut être effectuée dans la même opération, alourdissant le pronostic. Chez les enfants de moins d'un an, aucune lentille intraoculaire n'est implantée pour remplacer le cristallin, une rééducation visuelle à l'aide d'une paire de lunettes ou d'une lentille de contact souple sera nécessaire dès que possible si la transplantation cornéenne le permet.
Dans le cas où l’anomalie s’accompagne d’un glaucome, ce dernier devra être traité afin de normaliser la pression intraoculaire, les dommages au nerf optique étant irréversibles. Parfois, l'utilisation de collyres hypotonisants topiques est suffisante, tandis que dans d'autres cas, un traitement chirurgical sera nécessaire pour normaliser la pression intraoculaire.
De même, il est important d'exclure d'éventuelles malformations associées, d'obtenir des antécédents familiaux complets et d'effectuer un examen de la vue sur les parents et les frères et sœurs, afin d’apporter des conseils génétiques. Enfin, il ne faut pas oublier que pour obtenir le meilleur pronostic visuel et minimiser le risque d'amblyopie (œil paresseux), le traitement de ces enfants, dont le système visuel est en plein développement, doit être conduit le plus tôt possible.